femme cheveux longs

Je vous propose un bilan de la place des réalisatrices en 2019. L’année importe peu, l’idée est de se faire une photographie de la situation actuelle. Et malgré les mouvements #MeToo et la libération d’une certaine parole, le cinéma français est loin de refléter la parité.

Une impression de voir plus de femmes?

J’ai compté 201 films français sortis en 2019, tous genres confondus. Avec des durées divers (certains autour de 60 minutes). La liste contient également des coproductions avec différents pays (Belgique, Japon, Turquie…).
Je ne parle pas ici de qualité, mais de représentations.

Mais vous êtes fous d’Audrey Diwan


Avant d’entrer dans le détail, voici la liste ci dessous des films dirigés par des femmes. Cela peut paraître long, mais il me semble nécessaire de leur donner un peu de visibilité. Pour chaque film, vous aurez un lien renvoyant plus d’informations. Si je peux aider à faciliter l’envie de se renseigner sur ces films (bons ou mauvais, encore une fois là n’est pas le débat).
Au moins, ça donne l’opportunité de se questionner sur ce cinéma (invisible).

Une place réduite

Je compte donc 35 films réalisés par des femmes, dont 3 coréalisés avec un homme. Autant dire que qu’elles ne représentent pas grand chose.
Je compte quatre réalisatrices non blanches, mais je peux en avoir oubliées.
Sur ces 35 films, on peut dire qu’une petite douzaine ont été vraiment médiatisés. Et encore, je suis généreuse. Et moitié moins ont bénéficié d’un nombre de copies correct. Évidemment on ne va pas donner le même nombre de copie à Portrait de la Jeune Fille en Feu, et Le Corps Sauvage, on est d’accord.
N’empêche que sur ces 35 films, on peut compter sur les doigts d’une main ceux qui ont pu avoir la chance d’être suffisamment visibles pour espérer toucher le public.

Les réalisatrices françaises représentent 17,9% des films en 2019

Liberté, Inégalité, Sororité

Il m’a semblé important de rappeler que malgré le fait que le problème du sexisme et des représentations soient maintenant régulièrement évoqué dans les media, dans les faits, on est loin d’approcher de l’égalité.
Julia Ducournau, réalisatrice de Grave, s’était énervée sur un plateau télé, car les invité-es et animateurs commençaient à évoquer un soi disant « assaut » des femmes dans le monde du cinéma. Un frémissement éventuellement.

La vérité c’est que sur le terrain, les réalisatrices n’avancent pas beaucoup.
C’est pourquoi le travail du Collectif 50/50 est non seulement essentiel, mais surtout au tout début de son travail.
D’autant plus que l’écart de salaire entre réalisateur et réalisatrice est le plus important dans le monde du cinéma: 42%!
La part des réalisatrices est de 24%. Quand on voit que 18% ont sorti un film en 2019, ça laisse songeur…

Qualifie ton genre!

Mais pourquoi tant s’embêter avec ces questions? Les réalisatrices ne créent pas forcément des meilleurs films que les hommes. Certes. Ne serait ce que dans cette liste, on peut constater quelques accidents comme Alien Crystal Palace ou Blanche Comme Neige.
Pour autant, je vous laisse regarder la liste des 166 films restants, on ne constate pas que de chefs d’œuvre, alors que la visibilité des réalisateurs, ou du moins l’accessibilité à faire des films, domine.

Le Corps Sauvage de Cheyenne Caron

Par ailleurs, il serait intéressant, dans le cas où une parité existerait, de comparer réellement les sujets, et les types de rôles dirigés par des réalisatrices. Pour le moment, c’est compliqué. On ne sais pas vraiment combien de films proposés par des femmes à des financeurs ont été refusés, et pour quelles raisons.
Encore une fois, comme je l’expliquais dans mon article consacré à l’absurdité de séparer l’homme de l’artiste, c’est une question d’égalité à l’accès à faire des films. Et cela mènera forcément à des nouvelles histoires, rôles, mises en scènes à découvrir.

Le vrai problème que tout le monde tait, c’est que les réalisateurs seront obligés de laisser place et financements pour atteindre l’égalité.

Faire plus de place passe par abandonner des privilèges

Cela implique un élément dont personne ne veut évoquer: le fait que les hommes devront céder plus de place, plus de sous. Et ça, personne n’en a envie. On veut bien clamer qu’on aime les femmes et qu’on souhaite l’égalité. Renoncer à des privilèges est plus compliqué.
Pourtant, serait ce un problème que de temps à autre un réalisateur ait moins de sous pour un film? Encore une fois, quand on voit la qualité de certains films, on pourrait se poser la question.
Le vrai nerf de la guerre c’est l’industrie du cinéma. Comme dans tous domaines, il faut produire vite et plus. Qualité ou pas.

Dans le documentaire Tout peut changer d’Avi Lewis sur la place des femmes à Hollywood, un cinéaste noir évoque le reproche principal fait à la nécessité de la parité. A savoir que cette exigence de quota, fait que des hommes peuvent être écartés de projets, et qu’ainsi ça serait se priver de qualité potentielle. Or lui pointe que dans la mesure où le point de vue dominant reste celui d’un homme blanc, l’introduction de plus de réalisatrices permettrait au contraire d’apporter enfin plus de richesse.

On peut constater déjà que les réalisatrices investissent à peu près tous les genres : drame, comédie, fantastique, documentaire, animation…
Ce qu’il manque c’est de la place (et des financements).