homme déguisé en drapeau USA

C’est en regardant par hasard ce que le Pathé Atlantis diffusait, que je me suis aperçue qu’un American Nightmare 4 : les origines de Gerard McMurray, était sorti sur nos écrans. Sauf erreur de ma part, il me semble que la communication sur le film a été discrète, pour ne pas dire quasi inexistante. Même dans le Mad Movies de juin, je n’en ai pas vu la trace.

C’était l’occasion de revisonner la saga avant d’aller subir inévitablement la VF d’American Nightmare 4 (pas encore une seule séance en VO au Pathé). Ces revisionnages et la découverte du 4ème volet m’a amenée à une conclusion décevante : la saga passe à côté de son sujet, film après film.

Attention (petits) spoilers.

Dans le pays des pères fondateurs, le viol n’existe pas

Premier constat, commun aux quatre films : le viol n’est pas un crime.
Mieux, il ne fait pas parti des actes de violence illégaux de quelle que nature que ce soit, puisqu’à aucun moment dans chaque film de la saga, un viol est commis pendant les purges. Il n’est pas même pas évoqué, mentionné, sous-entendu (tout juste dans le 2ème quand le cliché du gros dégueulasse s’attaque à sa voisine qui l’ignore tous les jours). Rien. Étonnant quand on sait que c’est le crime le plus largement répandu. Surprenant quand on sait à quel point la domination masculine pourrait prendre toute son ampleur, sans limites, lors de cette purge.
Les violences sexuelles : voilà un angle à aborder qui aurait pu être intéressant.

American Nightmare; la chance du débutant.

Affiche marionnette

Le premier film, un home invasion réalisé par James DeMonaco (2013), bénéficie de la révélation de l’intrigue pour le moins captivante. American Nightmare (The Purge en VO, merci pour cette traduction d’anglais à anglais avec toujours moins de pertinence), met en scène la nuit d’horreur vécue par une famille, lors de la purge annuelle. Son principe ? 12h par an, tout crime est légal, et les services de secours ne fonctionnent pas.

Le principal défaut que les critiques relevaient, était que l’action se concentrait uniquement en huis clos. Ainsi, le spectateur n’avait aucune information sur le déroulé des évènements à l’extérieur. Mais avec un tel sujet, à multiples angles de points de vue, American Nightmare avait de quoi envoyer du bois:

-Si le crime est légal, sommes-nous malgré tout, des criminels le reste de l’année ?
-Comment s’organise une résistance ?
-La relation des USA avec les autres pays sur ce sujet ?
-Les répercussions psychologiques/matérielles sur le reste de l’année ?
-Peut-on continuer à faire confiance à son médecin qui purge ?
-La violence libératrice règle-t-elle le quotidien du reste de l’année ? -Combat-on le mal par le mal ?
-Comment se comporter à l’année avec son entourage pour ne pas risquer de se faire tuer la nuit de la purge?, etc..

Il est connu que le producteur Jason Blum, de la société BlumHouse Productions n’investit guère plus de 5 millions de dollars par films. Mais il serait opportun de mettre le paquet de temps à autre dans le scénario.

American Nightmare 2 : Anarchy; ou le début d’une anarchie.

affiche american nightmare

Dans le 2ème volet (sorti en 2014 !), toujours mis en scène par James DeMonaco, intitulé American Nightmare : Anarchy, on suit toujours une famille lors de cette nuit d’enfer, mais à l’extérieur. La différence (notable) étant qu’il s’agit d’une famille modeste issue d’une minorité, et non plus une famille aisée blanche.
C’est donc l’occasion donc de découvrir la situation en ville. Malheureusement, plusieurs pistes sont évoquées, sans qu’elles soient exploitées : les riches qui paient les pauvres pour purger, la mise en place d’une résistance, les gentils qui cèdent à la violence par vengeance (du coup est-ce toujours des gentils ?), etc…
Le film est efficace sur son aspect thriller, chasse à l’homme. La mise en scène est turbulente et les personnages sont plutôt attachants, même si pas très bien écrits. Malgré tout, cela reste soft comme anarchie…

American Nightmare 3 : Élections; ou le début de la résistance.

James DeMonaco rempile en 2016 pour American Nightmare : Elections. Il est question de suivre le parcours d’une femme politique, qui milite contre la purge.
Évidemment, elle est grandement menacée lors de cette nuit. Et évidemment, le film prend une tournure inattendue (non), à savoir que tout ne se passe pas comme prévu.

Des quatre films, c’est celui qui essaye de tenir au mieux son sujet de départ : la politique et son adversité. Quand on sait à quel point cela peut être éprouvant, voire dangereux, même sans purge, on devine que la volonté de se lancer contre le parti en place est déterminée.
American Nightmare : Elections, présente succinctement les enjeux d’une stratégie politique. Par exemple la sénatrice ne peut se cacher le soir de la purge comme les riches. Ou encore, le pouvoir en place voyant que la purge perd en popularité, décide qu’aucun-e citoyen-ne n’est intouchable, etc.. Il y a même une dénonciation du lien entre les conservateurs et la folie bigote. La notion de purge est liée à l’expiation des péchés, et où finalement tout se mélange : violence, fanatisme…

Enjeux bâclés

Malheureusement, d’autres pistes sont lancées à la va vite comme par exemple le tourisme de meurtre, le fait que des purgeur-ses soient déstabilisé-es pensant que tuer soulagera leur conscience…. Tandis que d’autres éléments narratifs ne sont pas expliqués (pourquoi la purge perd en popularité, pourquoi finir le film en affirmant que des émeutes après l’élection de la sénatrice empêcheraient l’arrêt de la purge ?…).
Dans la mesure où les enjeux politiques sont abordés de façon superficielle, le fait d’ajouter des sujets ayant un potentiel, plombe le propos du film. Sans compter qu’on retrouve une fois de plus des personnages caricaturaux toujours peu écrits (l’ancienne délinquante qui a bon cœur, la sénatrice marqué par une purge qui veut la supprimer, etc…).

Point positif : casting en grande majorité non blanc, et une fois n’est pas coutume, les méchants sont blancs.
Mention spéciale également à l’attaque féminine de toute folie qui braque l’épicerie. Lumières, sang, robes, flingue, caméra déstabilisée, la scène nous plonge bien dans un délire complètement électrique.
En somme, American Nightmare : Elections est divertissant, mais classique.

A noter que l’affiche fait référence à la célèbre photographie de Joe Rosenthal. La photo représente des soldats américains plantant leur drapeau sur l’Ile Iwo Jima, prise aux Japonais.

American Nightmare 4 : les origines; dont on ne sait toujours rien.

Le dernier opus, American Nightmare : les origines, est confié à Gerard McMurray. Il est censé retracer les origines de l’idée et de la mise en place de cette purge. Rappelons que ce mot est très fort, parce qu’il fait appel à la notion de purifier. C’est sans doute l’opus qui manque davantage son sujet.

Le prologue du film, qui sont des images d’informations, évoquant la pauvreté toujours plus grande, les minorités qui galèrent plus que les autres, font écho à l’actualité, entendue tous les jours. Sans compter la question des armes en libre-service aux USA. Ou encore le lancement actuel d’une imprimante réalisant des armes en 3D en toute facilité, et validé par Trump…

Et pourtant, là encore tout est bâclé. L’arrivée au pouvoir du parti NFFA, le travail effectué avec la sociologue, la sélection des participant-es. Mais aussi la stratégie du gouvernement pour créer artificiellement ce besoin de purger (qui pourtant est a priori bien réel au regard des précédents films), les minorités pauvres sacrifiées en premier, etc…

Des personnages insignifiants

American Nightmare : les origines est par ailleurs alourdi par des personnages clichés (la belle ancienne délinquante qui milite pour la paix dans le monde VS son ex, dealer qui l’aime mais qui ne sait pas faire autre chose, le petit frère qui, au lieu de se préparer à affronter des évènements qu’on sait déjà trop compliqués pour lui, fonce tête baissée dans le pétrin, la gentille voisine énervante..). On assiste aussi avec consternation les répliques dignes des meilleurs nanars (« les secours sont arrivés »…).
Le film est bourrin, se permet plus d’aller dans le saignant, et on note des efforts dans la mise en scène (notamment dans la scène finale, dans l’immeuble, particulièrement réussie, traduisant l’urgence et le malaise). Mais on se perd totalement dans le propos.

Pour conclure, la saga American Nightmare est pleine de promesses et de pistes abordées, mais vite abandonnées. D’autant plus que le casting ne sert jamais aux films. Dommage, le cinéma de genre a perdu une occasion de montrer de quelle façon il peut être nécessaire pour amorcer des réflexions et des prises de conscience…Un rattrapage avec un possible 5ème volet ? Wait and see.