Planète B se situe en 2039 et dépeint une société facturée, sous hyper surveillance, où la désobéissance civile est réprimée voilement par un état policier. La jeunesse, confrontée à l’effondrement climatique forme la R (Résistance ?), un mouvement de désobéissance civile Eco-terroriste. Une nuit, des activistes traqués par l’État disparaissent sans laisser aucune trace. A leur réveil ils se découvrent enfermés sur un littoral totalement inconnu : PLANÈTE B.
Planète B est un film de genre français réalisé par Aude Léa Rapin, avec dans les rôles principaux, deux femmes, Adèle Exarchopoulos et Souheila Yacoub. Il fait partie du sous genre du film d’anticipation/dystopie.
Un futur fasciste et eco-anxieux
La mise en scène visuelle et sonore de Planète B lui confère un caractère très huis clos, qui n’est pas sans rappeler Les fils de l’Homme dans son côté froid mais intimiste. On parle ici d’un film d’anticipation, plus que de science-fiction. Car le film se déroule dans un futur très proche, et tous les motifs du film sont déjà à l’œuvre : la montée du fascisme et l’effondrement climatique.
La surveillance : thème cher à la droite dure et à l’extreme droite
Dans Planète B, la technologie est au service d’un système de répression au nom de la sécurité. Les civiles ont accès à des technologies basiques voir obsolètes alors que l’état est sur-équipé en numérique de surveillance. La vidéosurveillance algorithmique est normalisée (pratique largement critiquée par Amnesty International suite à son déploiement pendant les JO de Paris 2024). Les essaims de drones policiers surveillent tous les quartiers (mode se surveillance normalisé en France depuis 2023). Chaque citoyen doit porter des lentilles de contact à QR codes. Et des contrôles d’identité sont systématiques, ce qui permet d’exclure très facilement les personnes qui ne sont pas en règle administrativement, sans leur laisser de marge de manœuvre.
Des exilés déshumanisés
Souheila Yacoub interprète une journaliste exilée qui a dû fuir son pays pour opposition politique. Comme beaucoup de migrants, elle se retrouve une fois en France, cantonnée aux métiers les plus subalternes sur l’échelle sociale, alors que beaucoup d’entre eux disposent de diplômes et avaient une carrière dans le pays qu’ils ont dû fuir. Dans Planète B, cette ancienne journaliste ne peut toujours pas vivre sereinement, elle survit sous la menace permanente de la clandestinité et de l’expulsion. L’administration et la police ne la voient que comme une «migrante» qu’il faut faire sortir du pays.
La criminalisation des mouvements d’opposition
Aude Léa Rapin voulait mettre en lumière à travers Planète B les dérives des affrontements idéologiques entre société civile et force de l’ordre. Elle a été inspirée par des manifestations récentes, violemment réprimées aux quatre coins du globe : gilets Jaunes, Notre Dame des Landes, les manifestations étudiantes à Hong Kong, à Santiago ou à Beyrouth etc… Conflits où les forces de l’ordre n’ont pas hésité à blesser et mutiler les manifestants. Dans Planète B toute désobéissance à la bonne marche de l’état reçoit une réponse policière et judiciaire violente. Les civiles qui s’expriment contre l’état et pour la survie de la planète sont criminalisés.
La manipulation médiatique
Dans la France de Planète B, les médias ne parlent pas des dissidents politiques. La R n’existe pas, le mouvement est censuré pour ne pas encourager les gens à le rejoindre. Ce tabou médiatique est aussi un excellent moyen de nier l’implication du gouvernement, les opposants ne sont pas enfermés dans des prisons inhumaines, ils sont simplement portés disparus, ils se cachent car ils sont des criminels. C’est facile quand quelqu’un possède plusieurs médias de contrôler la ligne éditoriale et donc l’information.
Pendant la présentation du film aux Utopiales, Aude Léa Rapin nous explique qu’elle voulait aussi faire un lien avec les disparitions récentes et inquiétantes de personnalités connues en Chine. Des femmes célèbres à l’international qui ont critiqué le pouvoir : Fan Bingbing, Peng Shuai et Zhao Wei. Mais aussi certains membres du gouvernement, notamment le ministre de la défense.
La prison virtuelle, un futur possible ?
La prison virtuelle est un moyen de lutter contre les prisons surpeuplées. Dans ces prisons, les corps peuvent être empilés, il n’y a pas besoin d’espace, pas besoin d’exercice physique, pas besoin de soins. Le personnage d’Adèle Exarchopoulos et les autres résistants sont à la merci de l’armée, qui pratique sur eux de la torture psychologique sous forme de cauchemars, et de privation de sommeil afin d’obtenir des renseignements sur la R.
Les enfermer dans un système informatique est une allégorie intéressante de la dictature : un système informatique est par définition totalitaire. Binaire, il ne permet d’agir que dans certaines fonctions définies. Il n’offre pas de possibilité hors de ce qui a été cadré, choisi, imposé. Il est sans nuance, inhumain.
Polarisation des extrêmes et désobéissance civile
Planète B nous interroge sur un possible futur dystopique. Que doit faire la société civile face à l’inaction politique sur les enjeux écologiques ? La désobéissance civile (qualifiée de terrorisme par l’état – coucou Sainte Soline) est-elle le dernier levier pour forcer les états à respecter leurs engagements environnementaux ? Quand faut il intervenir ? Les gouvernements criminalisent les opposants, les migrants, les pauvres, bientôt ça pourrait-être vous ?
Planète B sort au cinéma le 25 décembre.