
Si je n’attends pas Halloween pour regarder des films d’horreur, cela reste un temps fort de l’année pour découvrir le cinéma de genre.
L’occasion donc de proposer ma sélection à travers 10 sous genres, époques et nationalités différents, permettant de découvrir en même temps, la richesse du cinéma de genre.
Préparez vos citrouilles.
Je vais volontairement m’écarter des très très populaires car vous n’avez pas besoin de moi pour les trouver. Certains dans cette liste sont évidemment connus des férus du cinéma de genre, l’idée est de s’adresser à un public moins connaisseur, mais qui a envie de découvrir ce cinéma à travers des films à la fois qualitatifs ET divertissants pour Halloween.
J’ai également écrit un article sur les sous genre du cinéma de genre si vous souhaitez en apprendre davantage.
1- Unfriended de Levan Gabriadze (2015) – USA
Genre: Screenlife
De quoi ça parle: un fantôme vient hanter une conversation webcam entre plusieurs amis.

Genre qui peine à se montrer sur nos écrans, c’est un sous genre qui utilise justement les vôtres. Un écran d’ordinateur pour être précis. Dérivé du foundfootage (rushes de vidéos « trouvées » dont Le projet Blair Witch est le représentant le plus connu), c’est étonnant de ne pas en voir plus, au regard de notre consommation d’écran.
Dans Unfriended vous êtes le spectateur direct (et concerné donc), de ce que vous voyez à l’écran. Vous « participez » à ce qui se passe. La montée en puissance est très bien gérée: on passe d’une discussion d’un couple, à des échanges de vacheries entre adolescent-es pour tendre vers une ambiance qui suscite interrogations et suspicions pour basculer dans l’horreur qui ne s’arrêtera pas.
En plus d’être un divertissement efficace, le propos d’Unfriended est une démonstration de la violence du revenge porn et du harcèlement scolaire. Sans surligner son sujet, le film parvient à diffuser son message en prenant son public non seulement au sérieux, mais à parti grâce au dispositif screenlife.
2- Witch Hunt d’Elle Callahan – USA (2021)
Genre: Sorcières
De quoi ça parle: De nos jours, les sorcières sont criminalisées et pourchassées. Dans ce contexte, une mère célibataire rejoint la lutte en les cachant pour qu’elles passent la frontière, ce qui n’est pas du goût de sa fille, Claire.

Un film de sorcières pour Halloween, cela me parait inévitable. A la lecture du pitch, on devine bien que Witch Hunt associe sorcières (figures marginalisées et dénigrées) et migrants (ou évidemment la Shoah). Quoi de mieux que de décaler le regard et les types de protagonistes pour traiter un sujet actuel et dramatique, maintes fois sujet de journaux télévisés et drames sociaux misérabilistes?
De par la nature illégale des agissements de sa mère, Claire se place en dehors de cette activité, elle qui cherche à s’intégrer auprès des filles populaires de son lycée. Elle devra cohabiter avec Fiona et sa petite soeur suite à des complications.
L’écriture du personnage de Claire est particulièrement brillant; il incarne presque à lui seul, le sujet du film: faire appartenance. On a de l’empathie pour cette adolescente qui a besoin de se sentir acceptée et aimée, et dont l’activité de sa mère la met dans l’inconfort. Fiona et Claire vont autant s’aider l’une l’autre, ce qui fait de Witch Hunt un véritable récit de sororité.
Par ailleurs, le film ne manque pas de suspens, de moments de magie, tout en délivrant un message de tolérance et d’acceptation, bien loin d’être mièvre. Dont on a besoin en ces temps terrifiants.
3- Carnival of souls d’Herk Harvey (1963) – USA
Genre: Fantastique
De quoi ça parle: Suite à un accident de voiture, Mary reste traumatisée. Elle entend et voit de plus en plus de choses étranges, entourée de fantômes.

L’idée de ce film est venu au réalisateur en découvrant une salle de bal étrange, dans un lieu désaffecté, à l’intérieur du parc d’attraction Saltair, donc rien que pour cette raison, c’est le film idéal pour Halloween.
Ne soyez pas rebuté-es par l’ambiance années 60 de Carnival of souls; son lot d’étrangeté, d’inquiétudes et de fantastique n’a pas vieilli d’un pouce.
On déambule avec Mary dans ce parc d’attraction nébuleux, et des scènes vont resteront en mémoire, dont une certaine scène de bal.
Carnival of souls narre les tourments liés aux traumas et à la mort, sans qu’il soit glauque. On est une atmosphère onirique qui vous enveloppera de curiosités, de flottements et de frayeurs.
Le programme parfait pour siroter un cocktail d’Halloween avec des bonbons fantômatiques.
4- Ava’s possession de Jordan Galland (2015) – USA
Genre: Diabolique
De quoi ça parle: Ava vient de subir un exorcisme et est désormais débarrassée de son démon. Mais elle a causé des torts pendant sa possession et doit aller consulter aux Possédés Anonymes.

Changement de registre, car il nous faut bien une comédie horrifique pour Halloween, avec Ava’s Possession qui là aussi ne se cache pas derrière son pitch. Il s’agit d’utiliser la possession comme métaphore de comportements problématiques liés à des addictions, et notamment l’alcool.
Assez peu de films de possessions abordent cet angle et cela me parait tout à fait pertinent, car on a tous connu/vu des personnes sous l’emprise de substances qu’on ne reconnait plus.
On suit donc le cheminement d’Ava qui cherche à comprendre les torts qu’elle a pu causer (dans la mesure où elle ne s’en souvient pas) et comment/si elle peut réparer.
C’est drôle, original tout en permettant de prendre du recul sur le sujet de l’addiction et nous invitant à prendre conscience que c’est une maladie dont les personnes souffrantes peinent à combattre.
J’évoque un peu plus en détail le film dans mon article sur la représentation de la possession.
5- Midnight silence de Kwon Oh seung (2021) – Corée du Sud
Genre: Psycho killer
De quoi ça parle: Une jeune sourde muette surprend un tueur en série et devient sa proie.

Avec Midnight silence ne vous attendez pas à un grand film maitrisé de bout en bout, mais à un film d’action et de suspens bien calibré pour Halloween.
Le handicap de son héroïne, Kyung-mi, permet évidemment d’instaurer de l’enjeu angoissant facilement et ça marche ! On est à côté d’elle, en forte empathie et la brutalité du serial killer est tout à fait crédible, ce qui permet d’intégrer une vraie notion de danger.
Par ailleurs, je trouve que le dernier quart d’heure est particulièrement bien géré, pointant le sexisme et le paternaliste de la société, qui devient un véritable obstacle supplémentaire pour l’héroïne.
Midnight Silence est prenant et globalement bien rythmé, alors ne boudez pas votre plaisir pour dynamiser votre soirée Halloween en deuxième partie de soirée.
6- Ropes de José Luis Montesinosde (2019) – Espagne
Genre: Huis clos
De quoi ça parle: Une jeune fille handicapée moteur et son père se retirent dans une maison isolée, en compagnie d’un chien dont le rôle est normalement d’aider Elena…

Encore une héroïne ayant un handicap (trope récurrent dans le cinéma d’horreur), dans un huis clos, mais cette fois victime d’un chien enragé. Le berger belge sensée lui faciliter la vie quotidienne, est victime d’une maladie qui le rend particulièrement agressif. Elena va donc devoir redoubler d’ingéniosité pour s’en sortir.
Ropes a le mérite à travers les déboires d’Elena de montrer à quel point une maison non pensée pour des personnes handicapées moteur s’avère être un véritable parcours de difficultés que nous valides, ne pouvons pas voir. Le film gère particulièrement bien son suspens, et comme les valides ne peuvent pas anticiper ou savoir ce qu’une personne ayant un handicap moteur peut faire, il nous est impossible de projeter ce que le personnage peut faire.
Pour maintenir l’attention et la tension, Ropes maitrise son rythme en intégrant la thématique du deuil, donnant lieu à des séquences touchantes, permettant une soupape.
7- Candyman de Bernard Rose (1992) – USA
Genre: Slasher
De quoi ça parle: Si vous dites trois fois son nom devant un miroir, le croquemitaine Candyman apparaitra et vous courrez à votre perte…

Parce que que serait un Halloween sans un slasher? On connait Ghostface de la saga Scream ou Mickaël Myers de celle d’Halloween, mais on connait moins Candyman, seul croquemitaine noir de la culture populaire Américaine.
Ce croquemitaine interprété par Tony Todd, est l’un des seuls dont la vengeance et la violence se déploie suite au fait qu’il ait été martyrisé lui même. En effet, tombé amoureux d’une blanche à l’époque des colons, il fut puni par les blancs, qui badigeonneront son corps de miel afin d’être attaqué par les abeilles. D’où son nom.
Armé d’un crochet, Candyman apparait grâce à sa légende qui est notamment perpétuée dans la cité pauvre de Cabrini Green.
On suit Helen, jeune journaliste blanche qui tente de faire sa place dans ce milieu machiste. Elle entend parler de la légende de Candyman, et décide d’enquêter.
Si la plupart des slashers évoquent le sexisme et les violences sexuelles, le sujet de Candyman est, vous l’aviez deviné, le racisme. C’est donc un slasher plus évident politiquement que les autres, mais le fait d’aborder ce sujet de société sous un angle de légende et d’histoire Américaine, en fait un film à part.
Helen et Candyman sont unis par le fait de subir une oppression différente mais bien présente et qui dans les deux cas, perdurent.
D’un point de vue purement slasher, il propose des séquences assez classiques mais bien exécutées, avec une bonne dose d’hémoglobine attendue pour Halloween.
Le film connaitra deux suites (médiocres), et un remake intéressant mais inabouti, si vous souhaitez continuer l’expérience…
8- The Children de Tom Shankland (2008) – UK
Genre: Sales gosses
De quoi ça parle: Des ami-es partent en vacances de neiges avec leurs enfants. Ceux-ci sont contaminés par une substance présente dans la forêt qui modifient leurs comportements…

Le cinéma d’horreur regorge de personnages d’enfants démoniaques, et The Children est une pépite sanglante anglo saxonne proposant un travail exceptionnel sur sa photographie.
Sa véritable force est de ne pas lésiner sur la brutalité et la violence, en intégrant une problématique maligne et facilement identifiable: comment parvenir à violenter son enfant dans un cas de légitime défense?
C’est stressant, saignant, avec une tensions palpable qui quand elle démarre, ne retombe jamais.
Parfait pour savourer son Halloween avec des pops corn.
9- La féline de Jacques Tourneur (1943) – USA
Genre: Créatures
De quoi ça parle: Irina, jeune mariée, semble être frappée d’une malédiction qui met à mal son mari qui se rapproche d’une jeune femme Alice…

Halloween étant propice à la création de déguisements de créatures, il faut une proposition avec l’une d’elle ! Comme son nom l’indique, La Féline raconte l’histoire d’une femme qui se transforme en panthère noire, qui doit jongler avec ses deux identités. C’est surtout l’histoire d’une femme qui est « trop » complexe pour son mari qui souhaite en faire une femme « normale » et conforme à ses attentes. Sa deuxième identité représente ce rejet et avant tout la volonté d’exister en tant qu’elle même.
Les films de genre à portée féministe existent donc depuis toujours, il s’agit simplement de rappeler qu’ils sont là, avec parfois plus de pertinence que certains films actuels.
Le film est connu pour être précurseur de techniques de mises en scènes pour créer la peur, qui feront date dans le cinéma d’horreur (comme la scène du bus). Le film est aussi un admirable objet esthétique, jouant avec l’ombre et la lumière et surtout le hors champs, permettant à la fois de faire fonctionner notre imaginaire mais aussi d’appuyer l’aspect fantastique.
La Féline est un des films emblématiques du réalisateur franco américain Jacques Tourneur (et rien que pour ça il fait quand même parti de notre patrimoine). L’actrice française Simone Simon fait preuve d’un tel charisme qu’on se laisse porter par ce conte émancipateur.
10- The angry black girl and her monster de Bomani J. Story (2023) – USA
Genre: Science Fiction
De quoi ça parle: Vicaria, élève afro américaine brillante, est cernée par la mort et le racisme. Quand son frère meurt, elle décide de le ressusciter…

The angry black girl and her monster s’empare du roman de Mary Shelley, Frankenstein, en mettant en scène cette fois une savante. Le film reprend finalement les bases de la réflexion du roman, à savoir « guérir » de la mort et transformer la mort en naissance.
L’idée brillante est d’intégrer l’action dans des problématiques contemporaines, du point de vue de la minorité afro américaine. Mais là où le long métrage est un plaisir à regarder et à entendre, c’est dans sa manière de politiser la question du racisme au delà des évidences, tout en infusant des dialogues très drôles et savoureux. Par ailleurs, sa tonalité un peu teenage movie, en fait un film horrifique facile d’accès pour Halloween. The angry black girl and her monster ne manque pas de rebondissements inquiétants et gores, n’oubliant jamais ses intentions de départ: traiter du corps et de la chair, dont tout scientifique se sent capable de surpasser; pour le pire et le meilleur (pire).