
La possession de l’être humain par le diable est un sous genre du cinéma de genre surreprésenté. Mélangeant religion, modifications corporelles, fascination de nos sombres penchants, la possession connait de nombreuses représentations sans toutefois jamais vraiment renouveler le genre il faut bien le reconnaître.
Mais quelles représentations et histoires sont racontés si le sujet est un homme ou une femme?
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SOMMAIRE
4-L’importance de ces représentations
1-Angle d’analyse de la possession

Il y a plusieurs manières de représenter la possession démoniaque. Ainsi, le Mal peut manipuler un tiers pour atteindre d’autres personnes (Shining). Il peut aussi passer par un objet pour manipuler le sujet (Christine, Magic). L’entité diabolique peut également tourmenter son sujet sans l’atteindre dans sa chair (Jusqu’en enfer, The Circle: chapitre 1, les élues). Mais il peut aussi être la source qui donnera des pouvoirs au personnage (Carrie).
Bref, le Mal a 1000 manières d’investir notre espace vital.
Le sujet possédé
Je m’intéresserais dans cet article uniquement aux représentations liées à une possession d’un personnage. Une entité maléfique qui fait corps avec son sujet.
Mais il faut également que le sujet soit abîmé physiquement ou psychologiquement. Et que ça ait un impact direct et personnel dans sa vie. Ainsi, je vais exclure tous les exemples mentionnés plus haut.
Pourquoi?
Parce que le fait de s’attaquer physiquement ou psychologiquement à un personnage, est associé à la destruction de l’autre. La considération du sujet n’a pas lieu, il est un objet, un réceptacle dans un autre but. Ce qui compte c’est le piéger, l’anéantir. Cela peut être dans l’idée d’une punition, de montrer son pouvoir ou encore d’asseoir sa domination sur plus faible.
En somme, beaucoup de thèmes qui sont profondément liés à la place des femmes dans la société.
Par ailleurs, quand on attaque spécifiquement le visage, c’est l’identité même qu’on essaye de faire disparaître.
Ainsi, mon objectif est de comparer le traitement des personnages féminins et masculins, selon l’optique décrite ci-dessus.
Je ne m’intéresserais pas aux enfants non plus, qui sont des personnages régulièrement utilisés dans la possession. Mais je pense que ces représentations touchent encore d’autres sujets.
2-Les femmes possédées
La place des femmes est particulièrement importante et massive dans le cinéma de genre. Le sous genre de la possession ne fait pas exception à la règle.
Il est courant de trouver le visage ou la silhouette d’une femme sur les affiches.
Souvent, on peut identifier le nom de la femme possédée dans le titre. Selon moi, cela fait référence à un certain cachet « histoires vraies » dont ces films s’inspirent parfois (soi- disant). On annonce aussi d’emblée au public qu’il va assister à la déchéance d’un personnage féminin (qu’on va donc voir souffrir apriori une bonne partie du film). L’étrange cas de Deborah Logan entre également dans le spectre d’analyse de la hagsploitation (la représentation des vieilles femmes dans le cinéma de genre).












Fluides mon amour
J’ai mentionné plus haut que les thèmes de la possession et de l’exorciste sont intimement liés à la religion.
On sait comment les institutions religieuses ont pu diaboliser les femmes. Elles fascinent par les fluides qu’elles produisent : le sang qu’elles perdent, le lait qu’elles peuvent produire. Mais également par le corps qui se modifie à l’adolescence, pendant et après des grossesses. Sans compter les accouchements, moment où l’expérimentation de la douleur peut faire revenir aux plus stricts instincts. Elles font peur car elles donnent naissance et donc ont un pouvoir incontestable sur la vie et la mort.
Avec toutes ses transformations du corps (puberté, grossesse, accouchement, ménopause), la femme fascine la société et la religion.
Par ailleurs le corps (et en même temps l’utilité de la femme), se modifient lors de la ménopause.
Elles sont également le symbole du Mal, car tentatrice avec ses charmes et ses formes. Sans compter le péché d’Eve d’avoir croqué dans la pomme…
Mon corps, pas mes choix
Mais la religion a surtout fait main basse sur le corps des femmes. Interdiction de l’avortement, de divorcer, d’avoir des relations sexuelles avant le mariage, devoir conjugal, contrôle vestimentaire…Bref la notion de domination se retrouve partout.
La possession et l’exorcisme allient tous ces éléments: le corps et ses transformations, le danger et la mort, les cris.

Les séances d’exorcisme sont une référence aux crises d’hystérie, évidemment associées (encore maintenant) aux femmes. Celles qui se révoltaient contre la domination masculine étaient régulièrement, au mieux discriminées, au pire internées. Les violences sexuelles créaient des traumatismes chez les femmes, mais leur parole était encore moins prise en compte, donc l’hystérie était toute trouvée. Et Freud n’a rien arrangé en liant sexe et hystérie.
A l’époque où la lobotomie se pratiquait, il suffisait d’avoir un comportement un peu étrange ou un retard mental pour la subir. Le cas de Rosemary Kennedy en est l’illustration.
Les points communs
L’idée de travailler sur ce sujet m’est venue en visionnant de nouveau le remake d’Evil Dead. Si le film m’avait laissé un bon souvenir, je ne me souvenais pas de la scène de viol dans la forêt, lors de la possession. La représentation du viol dans le cinéma de genre est une thématique qui pose beaucoup question, surtout d’un point de vue mise en scène. A partir de là, je me suis demandée quelles étaient les différences de représentation selon si le sujet est masculin ou féminin.

De manière générale, quand c’est une femme qui est possédée, elle est:
- hystérique,
- sexualisée (ou elle fait référence à la sexualité) et manipulatrice,
- abîmée physiquement (et au visage, symbole de l’identité) et/ou psychologiquement (un point commun que l’on retrouve avec les fantômes féminins Japonais),
- allongée et attachée.
Les femmes possédées finissent souvent par être allongées et attachées, dans un lit. C’est à dire qu’on les ramène dans un lieu lié à l’intérieur d’une maison, à l’intime.
C’est le cas dans L’Exorcisme d’Emily Rose, Stigmata, Ava’s Possession, L’Exorciste, L’Exorcisme de Molly Hartley, La Maison de l’Exorcisme, Inner Demons…
Les rares fois où les hommes le sont, c’est le plus souvent dans un lieu extérieur. Un commissariat pour Délivre nous du Mal par exemple. Le possédé est assis, jamais allongé. Cela diminue considérablement la position de faiblesse dans laquelle la personne attachée se trouve.
S’il est attaché dans l’hôpital psychiatrique pour L’Exorciste III, l’homme possédé n’est jamais allongé non plus.
The Possession of Mickaël King reste une exception (tout en sachant qu’il reste attaché à peine 1 minute).
Bref, si l’homme est attaché, il ne doit pas paraître trop faible pour autant.
Sexe, mensonge et possession
L’Exorciste, Regan remplit les critères ci-dessus. Elle est défigurée, descend les escaliers en araignée, se mutile la vulve avec un crucifix.
Dans L’Emprise, le personnage de Carla est violée par une entité. Elle est perçue comme hystérique par son entourage. On imagine l’impact direct sur sa vie intime.

La scène la plus efficace de l’Exorcisme d’Emily Rose, est celle où on ressent vraiment une entité prendre possession de son corps. La scène, dans une chambre d’étudiante, ne peut que faire penser aux histoires régulières d‘agressions sexuelles sur les campus.
Pour rester sur un film similaire, The Last Exorcism filme une adolescente bridée par son père fanatique. La source du Mal serait une relation sexuelle, qui entre complètement en opposition avec l’oppression religieuse dans laquelle elle vit. Il y a également des références sexuelles durant l’exorcisme.
J’ai déjà évoqué les viols par la forêt dans Evil Dead. Les rôles féminins sont bien abîmés physiquement. Le personnage féminin du 2, est particulièrement hystérique, en plus d’user de charmes et manipulation.
Concernant le remake, il y a une scène où le personnage enfermé dans la cave a un comportement sexualisé, uniquement avec l’autre personnage féminin du film.
Et comment oublier Jennifer’s body, dont l’intrigue même est centralisée sur Jennifer, mangeuse d’hommes.
Le sud de l’Europe ne fait pas exception
Dans le nanar espagnol Exorcismo, le Mal se manifeste qu’à travers le prisme de la sexualité. Sous fond de rites sataniques tout en nudité, la possession de l’héroïne symbolise même l’acte sexuel. Elle représente également la traditionnelle femme manipulatrice, qui conduira à la perte des hommes qui la désirent.
Même observation dans le raté La Maison de l’Exorcisme. C’est une version revisitée de Lisa et le diable, suite au succès de l’Exorciste. On ne sait pas avec certitude si c’est Mario Bava qui a tourné les scènes de possession, ou son producteur.
La possédée redouble de références sexuelles et le sexe est continuellement associé au Mal. On a droit à une longue scène de tentation du prêtre par sa fiancée défunte nue et très sexualisée, mirage du Diable.

Les femmes à l’origine du Mal
L’exemple de Démons est intéressant à analyser. Des spectateurs de cinéma se transforment peu à peu en démons, devant un film qui leur prédit de quelle manière la possession aura lieu. Le film en question montre que la possession démarre avec un homme suite à une égratignure. Dans la « réalité » c’est une spectatrice (noire) qui est égratignée en essayant le fameux masque diabolique (clin d’oeil au Masque du Démon) . Et du coup est à l’origine de la propagation. C’est encore elle qui viendra punir un couple frivole.
Quant à son amie possédée, elle se chargera d’une punk qui aura osé mettre du rouge à lèvres. Il ne fait pas bon de jouir de son corps.
La troisième femme possédée nous fera assister même à une parodie d’Alien, avec un démon qui explosera le dos de la copine de l’héroïne possédée. Le corps féminin est donc utilisé pour faire avancer l’intrigue.
Ce n’est pas le cas avec les hommes possédés du film. Ils sont anecdotiques dans leur représentation. Le leader du groupe (un homme noir) est visible 2 minutes. Et l’aveugle qui bénéficiera de quelques secondes.
En revanche ils sont bien abîmés au niveau du visage, comme les personnages féminins.
On s’approche ici d’une représentation de zombies finalement.

Girl power
Le Prince des Ténèbres montre des femmes qui se contaminent les unes les autres par le Mal. Les protagonistes masculins sont soit tués, soit manipulés. Là encore, ce sont les personnages féminins qui sont la source de progression.
Ni les hommes, ni les femmes ne sont physiquement atteints. Sauf le personnage qui sert de mère, et qui est complètement défigurée.
Là où le film de Carpenter est malin, c’est qu’il n’assimile pas les personnages féminins à des entités diaboliques. Elles prennent le pouvoir dans un contexte de blagues sexistes ou racistes. Ou de la violence qu’elles subissent. C’est subtilement souligné par l’héroïne dont on sait qu’elle a un passé douloureux avec les hommes.
Même si les deux cas sont différents, ce sont les personnages féminins qui sont moteurs de l’action. Et qui ne sont ni allongées, ni attachées. On ne tente pas non plus de les libérer du mal. On est plutôt ici dans de l’empowerment.
Changer le regard
Certains films tentent d’aborder des nouvelles thématiques.
Si Ava’s possession a des faiblesses, le scénario montre une véritable envie de renouveler le genre. On note un gros travail de photo autour de la couleur jaune, associée à la trahison. J’avais évoqué le sens de cette couleur dans Swallow.
Ici, l’idée n’est pas de faire la possession le sujet principal du film. Mais de se mettre à la place de la femme qui a été exorcisée. Quelle vie après?
Ava’s possession pointe ainsi les difficultés à se réinsérer dans la société, avec son entourage. Au même titre qu’un.e alcoolique ou toxicomane. Une manière de montrer que ces maladies n’ont rien à voir avec un manque de volonté. Et de montrer que ces personnes ont deux visages.
On suit le récit d’une femme qui tente de remettre de l’ordre dans sa vie, seule.
Ainsi, on la voit très peu possédée. Et quand elle l’est, elle est transformée physiquement sans être défigurée. Très peu d’allusions sexuelles également.

On a également une utilisation des clichés de représentation de la possession dans le film de la réalisatrice Julia Kowalski dans Que ma volonté soit faite, pour évoquer les biais patriarcaux.
Take the power back
On peut noter cette même notion d’empowerment dans P la Possédée. Ce film thaïlandais situe son action dans un bar de passes. L’héroïne utilise ses pouvoirs de magie noire pour se défendre. Elle est aussi attachée, mais jamais allongée.
Le foundfootage et l’écriture hasardeuse pénalisent complètement Inner Demons. Pourtant, le film propose d’ancrer la possession dans de nouvelles thématiques:
- Il n’y a quasiment pas de références à la sexualité. Ni dans le comportement, ni dans les dialogues,
- la toxicomanie est le fil rouge de la possession,
- le harcèlement scolaire est une thème sous-jacent,
- la violence domestique est évoquée.
La question de la toxicomanie est notamment pertinente. On sait que cette addiction peut transformer une personne.
Cela ne suffira pas à faire d’Inner Demons un film intelligent sur la possession. Il touche trop de thématiques en surface, sans fond. En revanche, il montre que l’on peut traiter différemment le thème de la possession.
Vieillesse et possession
Si L’étrange cas de Deborah Logan souffre de son dispositif de foundfootage, le thème est pertinent. Il s’agit d’une femme âgée, diagnostiquée Alzeihmer. Celles et ceux qui ont connu un proche âgé en fin de vie, atteint d’une maladie similaire, savent à quel point il peut devenir méconnaissable. Et donner l’impression d’être possédé.
On retrouve la fascination du sang menstruel qui donnerait le pouvoir d’immortalité. Délire qui a pour conséquence de faire des jeunes femmes, des proies.
Mais ce traumatisme qui, non seulement reste ancré en Deborah, se transmet à une petite fille. L’illustration même que les oppressions systémiques envers les femmes existent toujours, de génération en génération.
Par ailleurs, on sait aussi que les conséquences de traumatismes se transmettent génétiquement.
C’est également sous les traits d’une femme âgée que le Diable apparait dans l’inabouti Devil. La possession n’est pas au coeur du film. L’idée est de confronter des personnes face à leurs propres péchés. La vieille femme est présentée d’emblée comme le personnage moralisateur. Une représentation finalement proche de l’imaginaire collectif. Les vieilles femmes sont souvent vues comme agaçantes, ronchonnes, à se mêler de ce qui ne les regarde pas. Une Tatie Danielle en quelque sorte! Le Diable utilise ce personnage pour se placer comme moralisateur.
Femme enceinte dépossédée
Etonnamment, il y a peu de films traitant de la femme enceinte possédée. Le médiocre The baby tente de rapprocher changements psychologiques et physiques liés à la grossesse, et possession. Intéressant car c’est souvent le bébé endiablé qui est représenté (Rosemary’s baby, Baby Blood, Prevenge…).
On oublie souvent la mère, qui pourtant subit beaucoup de micro agressions lors d’une grossesse. Invasion de son corps par des tiers, étouffement de conseils, dépossession de son corps, bouleversement hormonal…Tant de thèmes qui auraient pu être passionnants.
Mais le film se perd dans dans des incohérences grand guignolesques.
3-Les hommes possédés

Dans un premier temps, on constate que des films avec des hommes possédés sont minoritaires. D’autant plus avec une personnage central.
Ce sont souvent des films qui sont moins accessibles au grand public. Moins diffusés, moins connus, moins vus donc. Par conséquent, l’image de l’homme possédé est moins ancrée dans l’imaginaire collectif.
De manière générale, il y a trois éléments qui reviennent quand ce sont des hommes qui sont possédés:
- Ils ne subissent pas ou peu de modifications corporelles,
- Le Mal qui les habite renforce leur position,
- Ce n’est pas l’unique personnage possédé du film (contrairement pour les femmes).
Dans Délivre nous du mal, il y a plusieurs hommes possédés, dont une femme. Celle-ci est la seule représentée comme folle et hystérique. Elle est également responsable d’un infanticide. Le personnage principal possédé a une stature de chef. Il n’est jamais hystérique. Sauf pour l’exorcisme final où son visage est aussi amoché.
Une force décuplée
Si on prend l’exemple de Shining, Jack Torrance est plus un outil pour atteindre sa famille. Il n’est pas changé physiquement et surtout il s’en prend aux autres. Le démon ne l’attaque pas physiquement ou psychologiquement. L’homme devient violent avec autrui, en particulier ses proches. C’est le cas dans Amityville ou Emprise. Ces personnages ne sont ni faibles, ni hystériques. Les hommes possédés dominent d’autant plus. Là où les femmes, malgré une force qui peut être décuplée, sont plus souvent attachées ou traitées chimiquement.
Les films avec des hommes possédés sont minoritaires et ne sont pas des blockbusters. L’image de l’homme possédé est moins ancré dans l’imaginaire collectif.
The Possession of Mickaël King (un des seuls films où le nom du possédé est dans le titre), illustre ce cas. Sa force est décuplée. Il devient même un prédateur la nuit et tue au hasard. Même s’il s’attache (lui même, et non pas par une tierce personne, comme c’est le cas pour les femmes) une fois au lit, il est totalement libre. Non seulement personne ne vient l’arrêter, mais en plus sa demande d’aide est rejetée. Les atteintes corporelles qu’il subit sont commises par lui. Fait rare, l’homme est l’unique personnage possédé du film.
Le personnage subit des contorsions du corps similaires à ce qu’on peut retrouver chez les femmes.

Une violence physique représentée différemment
Dans The Strangers les hommes subissent des légères modifications corporelles. Mais ils sont en majorité calmes (sauf un à la fin). Les hommes possédés ne sont pas hystériques, contrairement à la petite fille. Et surtout c’est celle-ci qui est l’objet de l’intrigue. Les quelques hommes possédés ne sont qu’anecdotes.
Dans l’Exorciste III, le possédé n’est quasiment pas transformé physiquement (et rien au visage), et n’est pas hystérique. Il déploie également sa force pour tuer des personnes qui ne sont pas dans son cercle. En revanche, il est enfermé et attaché. Mais pas dans un lit, et pas allongé.
Le possédé dans Belzebuth l’est uniquement à la fin. Et avant que son entourage pratique un exorcisme, il utilise sa force impulsée par le démon pour s’en prendre à eux. Il ne subit pas de transformation physique. Ici, la possession symbolise l’homme tourmenté par ses propres démons et souffrances.
On pourra noter qu’Ash est sévèrement attaqué physiquement dans Evil Dead 2. Sa force est décuplée également et il n’est pas hystérique (contrairement au personnage féminin qui rit nerveusement). Il n’est pas le seul personnage possédé.
Provocation du Mâle?
Le traitement de l’homme possédé (Sonny) dans Amityville 2 est différent de ces précédents exemples. La représentation de sa possession est très proche de ce qu’on peut voir chez des femmes. L’entité le pénètre, on y voit clairement une référence au viol ou du moins à une agression sexuelle.
Il subit des transformations physiques importantes. Et il finira enfermé. C’est également le seul personnage possédé.
Mais il exécute sa famille à la manière d’un tueur d’un fait divers ou lors d’un féminicide. Il n’utilise pas de pouvoirs. Mais une carabine. Et méthodiquement, froidement, il abat les membres de sa famille.

La manière dont Sonny est possédé peut fait écho à l’histoire incestueuse avec sa soeur. Il a clairement été dominant. Une manière d’être puni? Ou d’appeler le Mal?
Dans The Possession of Michaël King, le personnage essaye plusieurs rites pour faire venir les démons.
Le nanar Messe Noire, fait le portrait d’un adolescent martyrisé par ses camarades. Il assouvira sa vengeance en appelant le diable.
L’homme possédé dans Belzebuth est le résultat d’une enquête de l’inspecteur au coeur des ténèbres. Avec un personnage déjà tourmenté.
Tout comme dans Délivre nous du Mal où les soldats possédés parce qu’ils ont dérangé une entité.
Bref, le personnage masculin est souvent acteur du déclenchement du Mal (volontaire ou pas). Les femmes ont tendance à subir. Elles sont souvent même heureuses avant d’être possédées.
4-L’importance de ces représentations

Pointer ces différences ne veut pas forcément dire que c’est bien ou mal. Et encore moins dénigrer ces oeuvres, que pour beaucoup j’apprécie.
Le tabou du viol
Si on prend l’exemple du viol, c’est un crime qui concerne essentiellement les femmes. Il est donc plutôt cohérent de retrouver ces thématiques. Cela peut être une manière de pointer ce problème, notamment via le symbole du viol représenté par la possession du corps. Mais aussi de montrer que ce crime représente une réelle souffrance physique et psychologique qui elle, peut rester à vie. Et pour certaines femmes comme Virginie Despentes, ne brise pas, mais façonne la manière d’agir et de penser ensuite. Dans tous les cas, c’est une possession du corps qui n’est pas sans conséquences.
Mais il serait tout à fait opportun d’utiliser la possession aussi pour évoquer les viols commis sur les hommes.
La sexualité est l’affaire de tous.tes
Par ailleurs, la possession fait très souvent référence à la sexualité quand il s’agit d’une femme. Et là, je ne vois pas pourquoi les hommes en seraient exonérés. Les hommes draguent plus souvent que les femmes, parlent plus de sexe entre eux. Combien de pénis voyez-vous dessinés dans une salle de classe ou dans la rue, contre des vulves?
On comprend bien qu’il est question de symboliser la femme comme tentatrice, manipulatrice. Source de désir et d’excitation. Or, les hommes peuvent aussi être désirés.
La sexualité est associée au Mal, sans s’intéresser aux vrais problèmes liés à ce thème: le consentement, la culture du viol par exemple.
Là encore, tout dépend du traitement du personnage choisi. Dans Ava’s possession, la manipulation par le sexe de la possédée est là pour dénoncer les comportements sexistes de son agresseur. Alors que dans La Maison de l’Exorciste, on a la représentation de la femme tentatrice par excellence.

La religion prenant une place importante, il est logique que la sexualité soit associée au Mal. Pour autant, dans l’optique de renouveler les thématiques, pourquoi ne pas parler des véritables travers liés à ces questions? La notion de consentement encore mal comprise, la culture du viol…
Pour autant, c’est un ressort narratif utilisé qui n’est pas toujours nécessaire. La représentation du viol est délicate à traiter. Il faut qu’elle ait un sens. Expliquer une souffrance, une détermination, un trait de caractère. Ou encore l’impuissance de la société à éradiquer ce problème. Traiter de la libération de la parole ou l’incapacité de la justice à traiter correctement ces crimes. Les thèmes à traiter ne manquent pas.
Mais montrer un viol pour montrer un viol, sans connexion à l’histoire du film n’a pas d’intérêt.
On ne peut plus rien faire?
Pour les hommes, on peut en déduire que quand une force maléfique les habite, elle ne fait que renforcer leur position déjà dominante dans la société. Même si certains finissent par mourir, la liberté qu’ils continuent de bénéficier malgré leur état, fait beaucoup plus de dégâts.
Proposer des représentations différentes, c’est raconter de nouvelles histoires.
Le Mal n’est jamais du côté des femmes. Elles sont utilisées, détruites de l’intérieur, infantilisées en raison de leur comportement hystérique.
Est-ce une façon de dénoncer les pratiques abusives sur les femmes? Ou est-ce le cinéaste qui a cette vision des femmes? Pour répondre à cette question, il faudrait poser la question directement aux réalisateurs. Et à ma connaissance, jamais ce genre de questions n’est abordé lors des interviews.
Associer l’homme à des faiblesses

On sait que les hommes peuvent être hystériques. Ils subissent aussi des traumatismes spécifiques, comme la guerre. D’ailleurs, on pourrait presque faire le lien avec l’Echelle de Jacob. Le film évoque des visions, de la folie, mais pas de la possession. Alors que la drogue évoquée dans le film qui a rendu violents les soldats, peuvent tout à fait s’inscrire dans une histoire de possession.
Par ailleurs, ils peuvent aussi être touchés par l’épilepsie. Autre état qui peut faire penser à la possession. C’est évoqué dans L’Exorcisme d’Emily Rose. Et pour avoir vu des crises, oui cela fait clairement écho.
Le renouveau c’est beau
Dans tous les cas, il serait temps de proposer des représentations différentes. Car ce sont des films qui raconteront forcément des histoires nouvelles. Et comme je l’écris souvent, il ne s’agit en aucun cas de censure. Mais bien de diversifier les propositions artistiques.
Avez-vous le sentiment de découvrir régulièrement des films sur la possession qui renouvellent le genre? Combien de fois entendons-nous des cinéphiles se plaindre du manque d’originalité des films? Donc je ne saisis pas en quoi attendre de nouvelles représentations serait néfaste pour la création artistique.
Au contraire. C’est une chance de surprendre à nouveau le public. Et le sous genre de la possession en a besoin!
Cela se voit d’autant plus que cet article ne contient que deux films réalisés par une femme. Il est temps que ce sujet intimement lié à la répression faite contre les femmes soient réapproprié par des réalisatrices.
Et vous? Quelles sont vos remarques sur ces films ou d’autres films de possession?
Films cités sur la possession:
- L’Exorcisme d’Emily Rose de Scott Derickson,
- L’Exorciste de William Friedkin,
- Ava’s possession de Jordan Galland,
- Belzebuth d’Emilio Portes,
- Possession of Mickaël King de David Jung,
- Messe Noire d’Eric Weston,
- The Last Exorcism de Daniel Stamm,
- L’Exorciste III de William Peter Blatty
- Délivre nous du mal de Scott Derikson,
- Stigmata de Rupert Rainwrigt,
- Démons de Lamberto Dava,
- L’Emprise de Sidney J.Furie,
- Evil Dead de Sam Raimi,
- Evil Dead 2 de Sam Raimi,
- Evil Dead de Fede Alvarez,
- Amityville de Stuart Rosenberg
- La Maison de L’Exorcisme de Mario Bava,
- Que ma volonté soit faite de Julia Kowalski
- Inner Demons de Seth Grossman
- Le cas de Deborah Logan d’Adam Robitel,
- Amityville 2 de Damiano Damiani,
- Prince des Ténèbres de John Carpenter,
- P La Possédée de Paul Spurrier,
- Jennifer’s body de Karyn Kusuma,
- Exorcismo de Juan Bosh Palau,
- Devil de John Eric Dowdle,
- The baby de Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett
- L’exorcisme de Molly Hartley de Steven R.Monroe

J’ai adoré cet article, la différence entre la possession des femmes et des hommes est vraiment impressionnante et les films cités méritent d’être vus !
[…] le mal, traitent de personnages en proie à des démons, voire au diable. Ces histoires de possessions donnent lieu à des exorcismes pour tenter de les libérer. C’est le sous genre idéal pour […]
[…] Changement de registre, car il nous faut bien une comédie horrifique pour Halloween, avec Ava’s Possession qui là aussi ne se cache pas derrière son pitch. Il s’agit d’utiliser la possession comme métaphore de comportements problématiques liés à des addictions, et notamment l’alcool.Assez peu de films de possessions abordent cet angle et cela me parait tout à fait pertinent, car on a tous connu/vu des personnes sous l’emprise de substances qu’on ne reconnait plus.On suit donc le cheminement d’Ava qui cherche à comprendre les torts qu’elle a pu causer (dans la mesure où elle ne s’en souvient pas) et comment/si elle peut réparer.C’est drôle, original tout en permettant de prendre du recul sur le sujet de l’addiction et nous invitant à prendre conscience que c’est une maladie dont les personnes souffrantes peinent à combattre.J’évoque un peu plus en détail le film dans mon article sur la représentation de la possession. […]
[…] rupture semble d’abord passer par une possession par le diable, antagoniste habituel dans la religion chrétienne. Le film ne s’arrête pas à […]
[…] et notamment le visage est déformé, abîmé. Un point commun que l’on retrouve chez les personnages féminins qui sont possédés. Si cela se remarque sur la J Horror de ces 20 dernières années, dès les années 50 on remarque […]